L’alternative à cet examen à note globale est un système d’unités capitalisables. Un système où il n’y a pas d’échecs, mais seulement des appréciations positives du travail de l’élève. Un système dans lequel le redoublement n’existe pas. Un tel système existe d’ailleurs déjà depuis 1950 dans certains pays et fonctionne bien. Les élèves étudient les matières qu’ils ont choisies à des niveaux de difficulté qui leur conviennent. Ne peuvent bien entendu choisir les modules difficiles que les élèves qui ont prouvé leur capacité. Dans ces conditions, la guidance prend une importance capitale. Dans chaque discipline, trois niveaux de difficulté peuvent être envisagés, standard, élevé et approfondi. Les sujets des examens sont proposés et notés au plan régional ou national. Ces examens sont étalés sur trois ans en fin de scolarité. Ainsi, à 16 ans, un élève peut choisir de passer dans une matière l’épreuve au niveau « standard ». Un an plus tard, il peut tenter le niveau « élevé ». Ou bien il garde sa note dans cette matière parce qu’il y a d’autres matières qui désormais l’intéressent plus. Ainsi l’élève se construit un porte-feuille avec des notes obtenues dans des matières librement choisies à des niveaux de difficulté consciemment choisis. Il accumule des succès et ne subit pas passivement sa propre sélection. Il ne rate aucun examen. Il a conscience de réussir à un niveau de difficulté donné dans une matière donnée et il peut améliorer sa note en repassant une même épreuve. Dans un tel système, un élève est libre de quitter l’école à tout moment à partir de 16 ans et il ne part pas les mains vides. A 16 ans, à 17 ans, à 18 ans, s’il a collectionné les bonnes notes à des niveaux élevés dans de nombreuses matières, il peut prétendre à l’entrée dans un établissement d’études supérieures. Comme chaque établissement a ses exigences d’entrée propres, l’élève prévoyant peut moduler le contenu de son porte-feuille de manière à satisfaire à ces exigences. Dans un système à unités capitalisables, l’élève connaît exactement sa valeur, ne se fait pas d’illusions sur son niveau. Il s’inscrit seulement dans les cours qui lui conviennent et pour lesquels il sent une affinité particulière. Sa carrière scolaire se déroule harmonieusement. Par ailleurs, un élève peu intéressé par les études peut quitter l’école à 16 ans, mais pas sur un échec. Il emporte avec lui son porte-feuille de notes dans les matières qu’il a suivies. Par la suite, après réflexion, il peut retourner à l’école ou se présenter comme candidat externe aux examens qui l’intéressent à tout moment de sa vie, car ces examens ne sont pas propres à l’école. En Grande-Bretagne, en particulier, de nombreuses universités offrent des cours d’été d’une durée de 10 semaines à ceux qui n’ont pas suffisamment réussi à l’école pour une raison ou pour une autre. Ces universités acceptent d’ouvrir leurs portes à des plus de 26 ans. Pour qu’ils puissent capitaliser d’autres unités, d’autres crédits. Dans un tel système, la différence n’est plus marquée entre un élève à succès et un élève moins chanceux. D’ailleurs, la différence ne devrait plus être faite entre les matières dites « académiques » et les matières à caractère « professionnel ». Ces terminologies sont désormais dépassées. L’élève choisit un éventail de sujets qui ont tous un aspect académique et professionnel. Un établissement d’enseignement doit éviter d’étiqueter ses élèves. Rappelons qu’en Ecosse, tous les jeunes gens d’un quartier fréquentent la même comprehensive school durant toute leur carrière scolaire. Cela permet sélection tardive, donc participation optimale. D’ailleurs, en Grande-Bretagne, on peut faire cette très intéressante constatation. L’étudiant décide d’aller à l’université par libre choix et non pas parce que le baccalauréat qu’il vient d’obtenir lui en donne le droit. Et il choisit d’étudier seulement dans les matières dans lesquelles il est capable. La conséquence est que le taux d’échec dans les universités britanniques est le plus faible d’Europe. Et pour la majorité des jeunes qui n’iront pas à l’université, l’expérience de l’école est une expérience positive. Aucun stress en fin d’année à cause de l’incertitude du passage. Pas de calculs de moyenne chaque fois qu’un devoir est rendu. D’ailleurs, dans le cas de l’interrogation habituelle, l’élève peut noter lui-même son travail à l’aide du corrigé. Ce qui l’intéresse, c’est de savoir ce que vaut vraiment son devoir. Ce type d’épreuves est formatif et peut être un diagnostic. Un enfant qui joue du violon peut accorder lui-même son instrument. Alors pourquoi ne peut-il pas corriger ses propres erreurs dans un devoir de mathématiques ? Et si on lui faisait confiance ? Faut-il absolument la sanction d’un adulte ? Pour éviter la triche ? Mais quel intérêt y a-t-il à tricher quand on prend vraiment ses études en mains ? A l’évidence, la plupart des systèmes éducatifs actuels encouragent la tricherie et l’illusion sur le véritable niveau atteint. C’est un corollaire du bac à passage oui/non, à réussite tout/rien. (La suite...) |
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